mardi 26 octobre 2010

annonce de la prochaine soirée de l'appel de Caen

VIVE L'INSECURITE !!!
La soirée est reportée ... à suivre !

prochaine réunion : le 7 décembre à 18h 30 à la Maison des Solidarités.

jeudi 23 septembre 2010

Compte Rendu de la réunion du 21 Septembre.


Nous nous sommes retrouvés, fidèles aux postes, pour échanger à nouveau sur l'actualité trépidente et les thèmes fidèles à l'inhumaine humanité.
Nous avons continué de penser ce qui nous est cher, précieux et précaire : la tension entre singulier et collectif, forme et fond, majorité et minorité, ainsi que des multiples formes de résistance et de créativité !


Nous avons cherché à souligner qu'au delà ou en deçà des discours sur les intérêts et les droits des salariés, d'autres questions étaient à l'oeuvre; de ces questions fondamentales qui concernent tout à chacun. Par exemple, pour la question des retraites, n'y a-t-il pas aussi et surtout la question de notre rapport au travail contraint ?

Nous pensons à l'organisation d'une soirée à venir sur le thème de l'insécurité : "vive l'insécurité !" ou de façon paradoxale : "Eloge de la sécurité" ...
ainsi qu'une autre sur la question des témoignages: de l'oeuvre propre aux témoignages, qui peuvent faire entendre la multiplicité et la singularité des situations vécues, mais qui ne se suffisent pas...

Nous nous retrouverons le 19 0ctobre à 18 H 30 pour continuer d'en parler.

en attendant, il y a l'appel contre les soins sécuritaires avec un comité local à caen :
une réunion aura lieu à l'espace convivial citoyen d'ADVOCACY le 29 Septembre à 18 H 00.

lundi 6 septembre 2010

ATTENTION
changement de date :
prochaine rencontre le 21/09/10 à la Maison des Solidarités.
... à 18 H 30
A signer de toute urgence pour la rentrée
L'appel contre les soins sécuritaires :

http://www.maiscestunhomme.org/

jeudi 27 mai 2010

soirée APPEL des APPELS 1 JUIN 2010

L'APPEL DES APPELS DE CAEN
ET LA PART DU COLIBRI DE LA MAISON DES SOLIDARITES
VOUS INVITENT
LE 1 JUIN 2010
à ECHANGER SUR LE THEME :
DES PETITS RIENS DANS LE TRAVAIL QUI CREENT LA RESISTANCE ...
à la maison des solidarités, 51 quai de juillet, Caen
RENDEZ VOUS à partir de 19 H OO sur réservation pour le buffet
à 20 H 15 pour le Café-débat, entrée libre.

vendredi 30 avril 2010

Compte rendu de la réunion du 27 AVRIL

Ce mardi, nous nous sommes donc retrouvés, vaillants et bien que fatigués, optimistes.

Nous avons relu ensemble le mouvement historique de la résistance, et avec lui, les conditions effroyables dans lesquelles des initiatives en faveur du respect inconditionnel de l'autre ont pu naître. Nous relisions à cette occasion que même si nos abordons des questions actuelles, elles ne sont pas nouvelles; que nous avons le devoir de tenir éveillé une flamme fragile, symbolisant une lutte contre la pente naturelle que prend l'homme lorsqu' il est acculé, celle de la loi du plus fort...
Aujourd'hui il est évident que derrière un discours "qualité pour l'amélioration des pratiques, etc...", la logique à l'oeuvre sous jacente est celle de la quantification, de la classification et de la segmentation...
Nous pensons qu'il est nécessaire de faire entendre, à qui veut bien l'entendre, que la transparence n'est pas un maître mot dans nos champs d'activité et qu'on ne parle pas des personnes comme on parle des marchés financiers; que l'appel est un appel à défendre le service aux personnes, un service public pour tous; que rendre des comptes est certes nécessaire mais à qui, comment et en fonction de quel critères... c'est cela même qui n'est pas discuté alors même que des décisions sont prises en rapport avec cette question contre laquelle nous nous insurgeons, à savoir : "combien ce type vaut par rapport à celui là ?"

Nous avons également échangé autour du titre à trouver pour la réunion de l'appel de Caen du 1 JUIN à La Part du Colibri.

Nous avons pensé qu'il serait intéressant d'échanger autour de la question du travail invisible, de ces petits riens qui n'ont l'air de rien et qui peuvent faire résistance ... aller laver les tasses de café qu'on laissait laver par la personne chargée du ménage ou intérroger ce que veut dire un panneau "interdit aux animaux" ou encore écrire sur un tableau "les adultes auraient ils les pieds plus propre que les enfants ?" par exemple ...

le titre finalement choisi est le suivant :

"ces petits riens dans le travail qui crée la résistance"...


Nous vous proposons également de diffuser l' APPEL A CONTRIBUTION et de l'afficher dans les institutions dans lesquelles vous travaillez et ailleurs...
Nous réaliserons des affiches en plus grand format qui serons distribuées lors de la
prochaine réunion le 25 Mai à 18 h 30 à la Maison des Solidarités.


Par ailleurs, voici ci dessous un extrait des états généraux pour la re-création du Service Public dont nous vous faisons part :

La réunion sur Caen aura lieu :
le 20 mai à 20h salle François Mitterrand à Ifs

La résistance est indispensable, mais nous ne pouvons nous contenter de
défendre un existant que nous voulons transformer, ni nous résigner à le faire
dans le cadre d’un choix de société par nature antagonique à l’essence du
Service Public. Il nous faut reprendre l’offensive idéologique sur le terrain du
Service Public (et pas seulement de tel ou tel SP).
Les politiques néolibérales viennent d’exploser dans une crise économique,
sociale et environnementale qui confirme à la fois leur inefficacité, leur coût
et l’injustice qu’elles produisent. Nous sommes convaincus que notre époque est
celle d’une prise de conscience par les peuples de l’unité de leur destin.
Nombre de biens et de services sont appelés à entrer dans le patrimoine commun
de l’humanité ce qui appelle une large appropriation sociale et la mise en œuvre
de services publics à tous niveaux : local, national, international, mondial. Le
XXI° siècle peut et doit être l’ « âge d’or » du service public. En raison de
son expérience et de son histoire, la contribution de notre pays pourrait être
essentielle dans cet avènement.
Nous proposons donc de nous appuyer sur les mobilisations existantves, et qui
gardent leur dynamique propre, les aspirations citoyennes, les comités existants
pour ouvrir un débat très large sur les axes suivants POUR des services publics
et une fonction publique du 21ème siècle efficaces et démocratiques.
1. Quels champs des services publics à quel niveau ? Quels sont les biens
communs dont nous estimons qu’ils justifient un service public ? À quels niveaux
? Quelles caractéristiques communes et quel contenu pour les missions incombant
à l’ensemble des services publics pour servir l’intérêt général ?
Déconcentration et/ou décentralisation ? Face au désengagement de l’État, au
sabordage des services publics nationaux, certains théorisent une
régionalisation dans le cadre d’une Europe des régions ? Quel impact de la
réforme projetée des Collectivités Territoriales, de la RGPP et de la
Réorganisation territoriale de l’état ? Il nous faudra poser le problème des
régions, de l’État et de l’Europe. Quel rôle des SP sur l’aménagement du
territoire, mais aussi sur les questions environnementales dans l’objectif d’un
développement soutenable ? Le service public face à la concurrence ?
2. Quelle démocratie ? Comment associer, au-delà d’un referendum, la
population, les personnels et les élus à une gestion démocratique des SP ? La
proximité géographique peut-elle faciliter cette gestion démocratique ?. Cela
renvoi aussi à une question plus générale de démocratisation de la société, du
travail… Cette question soulève aussi celle de l’évaluation des politiques
publiques, des services.
3. Quels financements ? On sait que depuis 20 ans il est de bon ton de
promettre des baisses d’impôts. On voit aujourd’hui les débats autour de la
fiscalité locale, de la fiscalité environnementale. On sait aussi que le
résultat est non seulement un affaiblissement des moyens de l’État et des
Collectivités Territoriale, mais aussi que la fiscalité est de plus en plus
injuste. La caricature finale étant la loi TEPA. Il ne peut y avoir de SP, de
politiques publiques, sans péréquations, égalité des tarifs, donc sans réforme
profonde de la fiscalité s’appuyant notamment sur un véritable impôt progressif.
Quelle part de financement des services réserver aux collectivités publiques et
quelle part à l’usagerE ? Quelle autonomie pour les services publics vis-à-vis
de la collectivité publique ?
4. QuelLEs agents ? Si l’on considère que le service public s’adresse à des
usagerEs et non à des clientEs, si l’on considère que l’agent public met en
œuvre l’intérêt général alors le statut de la fonction publique n’est-il pas une
pré-condition ? Quelle gestion ? Quelle formation ? Quels recrutements ? Quels
niveaux de salaires ?
Nous proposons un processus qui fasse de 2010 une année de débats et de
mobilisations citoyennes autour de ces grandes questions, à travers notamment
des États Généraux locaux et nationaux, une pétition nationale, une
manifestation nationale.

mardi 23 mars 2010

compte rendu réunion appel des appels du 16 Mars

De nouveaux venus nous ont permis de reprendre en quelques points historiques la trajectoire du mouvement jusqu'aujourd'hui tant sur le plan local que national et nous avons pu, grâce à eux, faire la connaissance des jolis noms d'oscar, d'amélie, ou d'eva (n'y a t il que des prénoms de femme et de chiens pour définir ces logiciels ? ) comme outils de comptabilité statistique à partir duquel sont déduit les performances des travailleurs ou comme produits à vendre et à soumettre aux clients dans une logique strictement marchande...
C'était aussi l'occasion de nous rappeler que le temps était compté... 15' pour répondre à l'accueil physique, 3'20" pour répondre à l'accueil téléphonique...à la CPAM, mais aussi la spécificité du travail d'éducateur de rue et sa très difficile évaluation... ou encore la nécessité de lire l'article du monde diplomatique intitulé "comment vendre à la découpe le service public ? de l'état providence à l'état manager..."

Par ailleurs, la charte des appels locale est en cours de réflexion; il nous a semblé à ce propos que le risque était d'en rajouter du côté des réglementations... peut être fallait il pouvoir éditer une charte sous formes de questions, un document questionnant... nous avons également parlé des valeurs que nous pouvions défendre, de celles qu'il était difficile de définir sans tomber dans une forme très consensuelle de propositions.

Nous avons ensuite pensé reprendre la question de la force des témoignages que nous pourrrions lier dans une forme "journal" qui ferait entendre l'hétérogénéité des pratiques, leur singularité et ce qui vient en empêcher l'émergence.

La ligne générale de l'appel des appels n'est peut être pas à trouver dans un discours commun, mais dans le fait même des rencontres et des liens des différents secteurs.
Faire multitude, construire l'hétérogénéité pourrait en partie décrire la dynamique de l'appel des appels.

Nous avons donc pensé qu'un appel à contribution pour témoigner de nos pratiques singulières pouvait être dès à présent lancé ...

Partager des témoignages, c'est ne plus être seul face aux empêchements rencontrés dans l'exercice du métier, c'est aussi lutter contre une politique de suspicion qui tend à faire croire que l'autre ne fait jamais rien ou jamais ce qu'il faudrait qu'il fasse, c'est enfin restaurer la possibilité d'un faire confiance, toujours précaire, mais indispensable à un travail coopératif ...

Ecrire, comme venir aux soirées de l'appel ou à d'autres, c'est se donner la possibilité de prendre une distance critique quant à ce qu'il est imposé de réaliser, ce qui permet de ne pas baisser les bras d'épuisement, de lutter contre le zêle au travail, d'ouvrir des brêches aux moments opportuns...

Enfin, pour continuer d'en échanger avec les personnes de la maison des solidarités et d'ailleurs, la part du colibri nous propose de participer à un des mardis thématiques du restaurant le 1 Juin 2010.

Pensez donc à réserver votre soirée !

Notre prochaine rencontre est prévue
le 27 avril de 18 h 30 à 20 H 00.

mercredi 17 février 2010

Compte-rendu de la Réunion Appel des Appels du 8 Février 2010



Lors de cette réunion, nous avons bien sûr réévoqué la soirée à l’université autour de l’intervention de Patrick Coupechoux dont les retours sont globalement positifs. Suite à cette soirée, reste posée la question de comment créer des espaces qui permettent davantage de faire circuler la parole, échanger, se rencontrer, ce qui reste difficile lors de ce genre de rassemblement du fait de son organisation et du nombre de participants.

Se pose alors la question des raisons d’être de l’Appel des Appels ;
- nous voulons créer des espaces d’échanges, de rencontres, pour faire du lien et sortir du corporatisme des différents secteurs,
- mais également organiser une forme de résistance dans une société où notre travail est de plus en plus prescrit, sans prendre en compte l’expérience et ce que vivent les professionnels au quotidien. Leur souffrance et celle des personnes qu’ils accompagnent n’est pas entendue, les réformes qui mettent à mal nos valeurs se succèdent, …
Comment faire barrage aux nouvelles lois, décrets, lorsque le « ras-le bol » exprimé massivement dans tous les secteurs n’est ni considéré ni reconnu ? Quels moyens avons-nous aujourd’hui pour mobiliser et résister ?
Les grandes réunions comme celles du 20 Juin et du 10 Décembre ont permis de faire les mêmes constats au sein des différents corps de métier.
Nous connaissons tous des personnes qui, dans leur secteur d’intervention, résistent individuellement et refusent, souvent discrètement, parfois haut et fort, d’appliquer ce qui va à l’encontre de leurs valeurs professionnelles et humanistes (éducation nationale, associations médico-sociales, services publics tels que la CAF, le pôle emploi, etc.).
Rassembler et résister… Un moyen de répondre à ces deux nécessités pourrait être de reprendre et repenser la proposition d’un intervenant de la matinée du 20 Juin, à savoir co-construire une « charte » interprofessionnelle. Celle-ci pourrait mettre en avant une façon de travailler ensemble qui :
Enonce NOS valeurs communes,
respecte les libertés fondamentales de chacun,
nous permette de sortir de la gestion par objectifs de « l’efficacité », de la « rentabilité », qui nous sont imposés par ceux qui veulent réduire notre travail, et les personnes, à des données quantifiables et qui ne prennent pas en compte les réalités du terrain.
Il nous faut au préalable, pour élaborer cette charte, remobiliser, amener les personnes qui résistent individuellement ou collectivement (associations déjà en place) à rejoindre l’appel des appels.
Nous pourrions alors rédiger un court texte d’appel aux témoignages (réfléchir aux possibilités de recueil qui préservent un certain anonymat) et à la mobilisation qui serait diffusé dans les différents secteurs professionnels, et nous permettrait d’agrandir et ouvrir notre collectif.
Notre prochaine réunion aura lieu le Mardi 16 Mars à 18h30, à la Maison de Solidarités, 51 Quai de Juillet. Nous pourrons reprendre ensemble l’idée de ce texte, mais aussi des autres possibilités de communication de l’Appel des Appels, ainsi que l’organisation d’une soirée autour du thème du sécuritaire.
à Lire aussi :

mardi 2 février 2010

Prochaine rencontre :
le 8 Février 2010, De 18 h 30 à 20 H 00, à La Maison des Solidarités, à Caen.

mardi 5 janvier 2010

La souffrance au travail ou le travail en souffrance



La soirée du 10 décembre 2009 /



Voici une relecture subjective de la soirée…

Dans les interventions qui ont suivi celle de P. Coupechoux, une personne rappelait l’existence du titre funeste «Arbeit macht frei», « le travail rend libre », qui siégeait à l'entrée des camps de concentration et des camps d'extermination, Auschwitz, Dachau, Gross-Rosen, Sachsenhausen et Theresienstadt. Quelques jours plus tard, cette inscription était volée ; elle a finalement été retrouvée … mais en morceaux…
« Le travail rend libre », découpé en morceaux… voilà de quoi introduire quelques points captés au vol de cette soirée.

Tout le monde aujourd’hui devrait pouvoir s’épanouir au travail, être performant, même dans sa recherche d’emploi. Il n’y a pas de reste, pas de franges, pas de manques… tout doit être plein…
Voilà le « plein emploi »…

L’emploi est donc bien distinct du travail, distinct lui-même du métier ou encore de l’ouvrage…. Le métier serait une pratique existentielle, une condition de l’homme. Il fait partie de la condition existentielle de l’homme d’exercer sa responsabilité pour l’autre, sa capacité à répondre de quelque chose pour quelqu’un. Et cela n’a rien à voir avec les conditions d’employabilité ou les profils de poste… Il faudrait donc que l’homme s’auto entreprenne (qu’il se prenne en main pour se bouger lui même), en oubliant ou en déniant que l’autre le constitue et le fait exister, et donc, que ce qu’il fait à l’autre, il le fait aussi à lui-même, que ce qu’il fabrique l’éprouve et le forme et qu’il est partie prenante du processus de fabrication… car s’il nie l’autre, c’est lui-même qu’il nie ; car ce qu’il fait pour l’autre, c’est aussi ce qui Le fait.

Pour qu’il n’y ait plus de fainéants (les mauvais) ou de personnes qui ne s’y retrouvent pas (les malheureux), il faut tout mettre en œuvre afin que personne n’échappe à la liberté promise par le travail et à l’épanouissement personnel. Il ne faut pas qu’il y en ait qui reste à la porte, il se pourrait qu’ils soient gênants. Il s’agit d’offrir, en rappelant au passage « les droits de l’homme », une chance à tout le monde, celles d’avoir un travail ou un logement, la même chance à tous puisque tout le monde se vaut, afin que les méritants puissent s’en saisir, ceux pour qui ça vaut la peine d’investir, ceux qui sont les valeurs sûres de demain…

Nous voilà plongés au cœur de la totalité, où plus une brindille ne doit plus être exploitée, plus une broussaille ne doit apparaître, tout doit être cultivé, rentabilisé, source de profit (M.Serres)… même la souffrance, valeur sûre de l’investissement au travail…

Ainsi, la compétition peut être un moyen, parmi d’autres, de pousser les personnes à donner le meilleur d’elles mêmes ; c’est vrai que le modèle sportif nous enseigne à ce sujet à plus d’un titre, mais n’a-t-il pas ses limites ? Cette émulation est valide à condition qu’elle soit limitée, c’est à dire à condition que ne pas réussir n’équivaut pas à chuter sans fin, que l’échec social ne coïncide pas avec l’échec existentiel : « j’ai raté ma vente » équivaut à « j’ai raté ma vie », « j’ai bien vendu » équivaut à « je me suis bien vendu » et inversement, « j’ai échoué par rapport à tel objectif que je m’étais fixé » équivaut à « je me suis échoué » ou « je suis un raté ».

La partie est distincte du tout et perdre une partie n’est pas tout perdre ; pourtant, aujourd’hui, il semble que le tout égale la partie et la partie vaut le tout… nous revoilà plongés dans l’espace de la totalité macabre.

Ce qui fait dire à certains « j’accepte tout… parce que dehors, il fait froid » ; parce que « je sais que ça ne va pas être mieux ailleurs », « parce que je crains de ne pouvoir retrouver un travail », « parce que sans travail, comment faire », « parce que je crains de me retrouver à la rue, tout seul ». Aussi, « si je n’adhère pas, je suis cuit… ». Nous oscillons donc entre la crainte d’être gelé, et celle d’être brûlé.
Voilà ce qui se nomme précarisation de la place sociale, une précarisation qui s’intériorise progressivement, qui se banalise (« c’est comme ça ») et se généralise (« c’est pour tout le monde pareil »)…

Il y a maintenant une sorte de consensus qui ne peut être remis en cause sur la nécessaire réhabilitation de l’entreprise (c'est-à-dire sa négation), sur l’argent comme souverain-bien, sur la compétition… « Débrouilles toi, fais comme tu le sens, comme tu le désires, comme tu le souhaites », « fais ce que tu veux » car « on n’est jamais mieux servi que par soi même » pourvu que les objectifs de rentabilité financière soient remplis, pourvu que le paradis fiscal puisse être atteint … voilà nos nouveaux credo, nos idoles (PIB, CAC 40) et nos mythologies (la crise est source de profit, elle est un tremplin pour aller plus loin…) :
Voilà le chemin pour réussir sa vie…

L’entreprise ne servirait plus à faire des services, des objets d’usage, elle servirait à faire de l’argent… ce qui change le temps de l’entreprise et qui remet en cause le travail du métier, car l’homme de métier a besoin de temps pour faire correctement son ouvrage, temps qui n’est pas celui de l’entreprise pour laquelle plus vite sera produit l’objet, plus grand sera le bénéfice… L’homme de métier est remplacé par le consultant qui dicte la façon de faire, la méthode (la seule et unique qui puisse être bonne) et qui transforme l’autre en exécutant, supervisé par un manager qui ne voit pas la différence entre « la fabrication de petits pois et celle des avions », puisque la finalité n’est plus celle du produit mais celle de l’accroissement constant des bénéfices.
Voilà le contexte…

Et la souffrance au travail… ?
« Vous souffrez ? C’est parce que vous êtes fragile… »

La société est un agrégat d’individus qui sont en lutte… il y a les plus forts, et les plus faibles qui sont à éliminer, ou qui s’éliminent eux-mêmes, la loi de la sélection naturelle faisant ici sa plus belle démonstration… c’est une loi naturelle à laquelle l’homme ne peut échapper, réduit à n’être qu’une bête comme les autres…

Peut-on rappeler ici avec J.Gagnepain que la spécificité de l’espèce humaine tient justement à ce qu’il est naturel pour lui qu’il soit de culture, qu’il est de sa nature de se dé-naturer ?
Penser qu’il est naturel que la loi soit celle du plus fort, c’est nier la nature même de l’homme et confondre par exemple élevage avec éducation, génitalité et paternité, grégarité et société.




Cette naturalisation de l’homme conduit à vivre avec le sacro-saint principe selon lequel « Il faut faire avec » :
- il faut accepter la compétition et l’idée de rentabilité à tout crin… car si vous êtes contre, c’est parce que vous êtes un réactionnaire qui prône un retour au totalitarisme stalinien ;
- il faut accepter que le système est complexe et que, comme tout système, il comporte des défaillances ; le psy, les groupes d’analyse des conditions de travail peuvent venir ainsi colmater la brèche, et le réparer pour un temps, afin que le système dans son ensemble puisse continuer à fonctionner de la même manière… car « il n’y a pas d’autres solutions » ;
- il faut accepter que le travail puisse rendre malade certains individus, définis comme les plus fragiles. Il s’agit maintenant de penser qu’il existe des spécialistes du travail et de ses pathologies. Un marché s’ouvre… Et d’ailleurs, « si vous souffrez, c’est que vous êtes investi au travail, vous êtes un bon élément…»

La souffrance se banalise, s’intériorise, et se majore…jusqu’à l’implosion suicidaire (se tuer), par crise de l’identité (je ne sais plus qui je suis) et génocidaire (tuer sa genèse), par crise de la responsabilité (nous ne pouvons plus répondre de rien, comment pourrait-on encore faire des enfants, ne serait ce pas criminel ?)

L’individualisation, la mise en concurrence, l’épanouissement personnel et la précarisation (« qui de nous sera le prochain sur la liste des licenciements ? ») entraînent une dé-solation comme l’écrit H.Arendt, c'est-à-dire une perte du contact avec le sol, comme base de l’existence, entraînant la résurgence d’angoisses archaïques de précipitation ou de chute sans fin. De même que les rythmes, les espaces n’étant plus marqués et supportés par un ensemble de personnes, les frontières deviennent confuses et confondent l’identité jusqu’à soulever des angoisses de dissolution.

Le néo-libéralisme, comme fer de lance d’un système en fuite, promeut l’extension des valeurs de compétitivité à l’ensemble de la vie humaine en vue d’une exploitation totale du capital humain pour sa libération : ainsi la concurrence à l’école comme dans l’entreprise ne peut être remise en question… de même il est juste de penser que l’ensemble de notre vie doit être consacrée à notre travail… que nous devrions pouvoir être joint à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, car nous sommes à la fois indispensable et éjectable, que lorsque nous devons partir à 18 H 00, les collègues nous demandent si nous avons pris notre après midi, et que si nous nous plaignions c’est que nous ne savons pas gérer la pression ou encore que nous n’avons pas une bonne méthode de travail. Nous avons donc tout intérêt à dire que nous nous éclatons au travail… terme qu’il s’agirait peut être d’entendre au sens propre !

La survie psychique ne peut alors se faire qu’au prix d’une négation existentielle.
« Globalement ça va… » Oui, mais au fond… ? Et en détail, à y regarder de près… Que se passe-t-il vraiment ? Quelles en sont les conséquences… Est-il juste de penser que c’est aux autres (les silencieux, les invisibles) d’en payer les conséquences ?

La folie ne peut pas entrer dans ce schéma… voilà le lien avec le « Monde de Fous » de P.Coupechoux.

Avec le fou, le contrat n’est pas possible ; « Il ne marchera pas dans la combine », car il pose, lui, la question de « ce qui donne à la vie le sentiment qu’elle vaut la peine d’être vécue » (D. Roulot).

Aussi la folie pose problème : Il faut donc supprimer le fou et sa folie en le réduisant à un être souffrant « comme tout le monde » qui doit se débrouiller comme il peut avec ses compensations, c’est l’handicapé psychique ou à un être totalement « hors du monde » et coupé de sa réalité, c’est le fou criminel.

Il s’agit donc de résister :
A la victimisation, à la « pathologisation » du travail, qui réduisent le problème à l’individu sans remettre en question les valeurs fondamentales du travail et de son ordonnancement social.
A la marchandisation de la souffrance, en exploitant la souffrance comme une ressource financière, comme un indicateur de l’engagement au travail, à force de « psy » télécommandés et de groupes de paroles.
A la naturalisation du « il faut faire avec », « c’est comme ça », sous entendu « il faut que ça continue » car « il n’y a pas d’autres avenirs possibles ».

Et de penser ensemble à une critique des rapports d’exploitation et de domination sociale, en inventant des stratégies politiques d’émancipation qui nous permettent de passer, par cet effort d’acculturation qui nous est propre, de la grégarité à la société.

Et de se poser la question de la légitimité du pouvoir : ne trouve-t-il pas sa légitimité dans la mesure où il peut aussi ne pas s’exercer et se retenir lui-même ? Comment peut-il être légitime et susceptible de confiance (qui suppose une alliance, un partenariat) s’il est tout-puissant (qui annule l’alliance et y substitue l’écrasement) ?

Dans l’assemblée, deux autres points soulevés… et un troisième…
Lorsque vous commencez à mettre en évidence tout ce qui n’est pas évalué, compté, les décideurs, voués à la cause de l’homme auto entrepreneur de lui-même, commencent à battre de l’aile… car « ils ne sont pas si sûrs d’eux qu’ils en ont l’air ».
Par ailleurs, faut-il rappeler que d’autres modèles sont possibles comme le travail coopératif, où la co-opération permet d’œuvrer ensemble pour une œuvre collective ? Rappelant là des principes de la pédagogie institutionnelle.
Et puis un autre, terrible, celui d’un témoignage… « Nous sommes venus pour entendre comment vous en parliez, de la souffrance au travail, ayant peur de la caricature… nous nous y retrouvons parfaitement… c’est ce qui s’est passé pour mon collègue qui s’est suicidé en sautant du viaduc ».

L’autonomie ne pourrait donc se penser sans la vulnérabilité, en lien avec la même question de notre rapport à l’autre en tant que c’est à lui que je dois mon existence ; je suis donc en dette et je me dois de lui rendre service en même temps que je suis capable, en tant que sujet de mon histoire, de me réapproprier ce que je suis, fait de tous ces liens qui me font exister.
Si l’on a parlé aujourd’hui de la question de la responsabilité à travers le travail et le sens du métier, nous parlerons sûrement, lors d’une prochaine soirée, de la question de l’identité à travers la notion du principe de sécurité.

Une prochaine rencontre est prévue le 18 Janvier à 18 h 30, à la Maison des Solidarités.